Tout ce qui n'est pas donné ou partagé est perdu (proverbe gitan)
mardi 3 mai 2011
La carte du tendre
Paroles de chanson La carte du tendre de Georges Moustaki
Le long du fleuve qui remonte
Par les rives de la rencontre
Aux sources d'émerveillement
On voit dans le jour qui se lève
S'ouvrir tout un pays de rêve
Le tendre pays des amants
On part avec le cœur qui tremble
Du bonheur de partir ensemble
Sans savoir ce qui nous attend
Ainsi commence le voyage
Semé d'écueils et de mirages
De l'amour et de ses tourments
Quelques torrents de médisance
Viennent déchirer le silence
Essayant de tout emporter
Et puis on risque le naufrage
Lorsque le vent vous mène au large
Des îles d'infidélité
Plus loin le courant vous emporte
Vers les rochers de la discorde
Et du mal à se supporter
Enfin la terre se dénude
C'est le désert de l'habitude
L'ennui y a tout dévasté
Quand la route paraît trop longue
Il y a l'escale du mensonge
L'auberge de la jalousie
On y déjeune de rancune
Et l'on s'enivre d'amertume
L'orgueil vous y tient compagnie
Mais quand tout semble à la dérive
Le fleuve roule son eau vive
Et l'on repart à l'infini
Où l'on découvre au bord du Tendre
Le jardin où l'on peut s'étendre
La terre promise de l'oubli
"Comme la tendresse qui naît par inclination n'a besoin de rien autre chose pour être ce qu'elle est, Clélie n'a mis nul village le long de cette rivière d'Inclination qui va si vite qu'on n'a que faire de logement le long de ses rives pour aller de Nouvelle Amitié à Tendre. Mais pour aller de Nouvelle Amitié à Tendre-sur-Estime Clélie a ingénieusement mis autant de villages qu'il y a de petites et grandes choses qui peuvent contribuer à faire naître par estime cette tendresse dont elle entend parler. En effet vous voyez que de Nouvelle Amitié on passe à un lieu qu'on appelle Grand Esprit, parce que c'est ce qui commence ordinairement l'estime; ensuite vous voyez ces agréables villages de Jolis vers, de Billet galant et de Billet doux qui sont les opérations les plus ordinaires du grand esprit dans les commencements d'une amitié. Ensuite pour faire un plus grand progrès dans cette route, vous voyez Sincérité, Grand Cœur, Probité, Générosité, Respect, Exactitude et Bonté, qui est tout contre Tendre, pour faire connaître qu'il ne peut y avoir de véritable estime sans bonté et qu'on ne peut arriver à Tendre de ce côté-là sans avoir cette précieuse qualité."
"Cependant, comme elle a présumé que la tendresse qui naît par inclination n'a besoin de rien autre chose pour être ce qu'elle est, Clélie, comme vous le voyez, Madame, n'a mis nul village le long des bords de cette rivière, qui va si vite qu'on n'a que faire de logement le long de ses rives, pour aller de Nouvelle Amitié à Tendre."
"En effet vous voyez que de Nouvelle Amitié on passe à un lieu qu'elle appelle Grand Esprit, parce que c'est ce qui commence ordinairement l'estime ; ensuite vous voyez ces agréables villages de jolis Vers, de Billet Galant et de Billet Doux, qui sont les opérations les plus ordinaires du grand esprit dans les commencements d'une amitié. Ensuite, pour faire un plus grand progrès dans cette route, vous voyez Sincérité, Grand Cœur, Probité, Générosité, Respect, Exactitude et Bonté, qui est tout contre Tendre, pour faire connaître qu'il ne peut y avoir de véritable estime sans bonté, et qu'on ne peut arriver à Tendre de ce côté-là sans avoir cette précieuse qualité."
"Après cela, Madame, il faut, s'il vous plaît, retourner à Nouvelle Amitié, pour voir par quelle route on va de là à Tendre sur Reconnaissance. Voyez donc, je vous prie, comment il faut aller d'abord de Nouvelle Amitié à Complaisance, ensuite à ce petit village qui se nomme Soumission, et qui en touche un autre fort agréable, qui s'appelle Petits Soins. Voyez, dis-je, que de là il faut passer par Assiduité, pour faire entendre que ce n'est pas assez d'avoir durant quelques jours tous ces petits soins obligeants, qui donnent tant de reconnaissance, si on ne les a assidûment. Ensuite vous voyez qu'il faut passer à un autre village qui s'appelle Empressement et ne faire pas comme certaines gens tranquilles, qui ne se hâtent pas d'un moment, quelque prière qu'on leur fasse, et qui sont incapables d'avoir cet empressement qui oblige quelquefois si fort. Après cela, vous voyez qu'il faut passer à Grands Services, et que, pour marquer qu'il y a peu de gens qui en rendent de tels, ce village est plus petit que les autres. Ensuite il faut passer à Sensibilité, pour faire connaître qu'il faut sentir jusqu'aux plus petites douleurs de ceux qu'on aime. Après, il faut, pour arriver à Tendre, passer par Tendresse, car l'amitié attire l'amitié. Ensuite, il faut aller à Obéissance, n'y ayant presque rien qui engage plus le cœur de ceux à qui on obéit, que de le faire aveuglément ; et pour arriver enfin où l'on veut aller, il faut passer à Constante Amitié, qui est sans doute le chemin le plus sûr, pour arriver à Tendre sur Reconnaissance."
"Clélie" de Madame de Scudéry (17ème siècle)
Mathilde Primavera.
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Jolie composition des pieds nus, enlacés.
RépondreSupprimerSe tenant par la main, ils ont marché pieds nus dans la rivière un moment jusqu'à cette herbe tendre qui les incite au repos, les pieds au soleil séchant, leurs mains dessinant la carte de leurs corps.
Que voilà une géographie qui me passionne Moi qui ai toujours été nulle en géo, je sens que là, je serais capable de retenir !!
RépondreSupprimerTotalement fan, je l'ai découverte dans ma jeunesse au lycée - mais jamais parcourue dans la réalité...
RépondreSupprimerMerci de la partager avec nous Mathilde. Bises :)
Merci de partager les temps bons de vie Mathilde.
RépondreSupprimerJeandler : j'aime cette photo de ce couple enlacé au bord de la rivière, elle suggère si peu et pourtant on sent tellement leur complicité et leur évident amour exprimés dans le plus simple apparat et magnifié par ce décor naturel que l'on ne peut que ressentir une vivifiante fraicheur qui se dégage du tout !
RépondreSupprimerMichelaise : ah, tu me rassures, moi aussi je regrette que les cours de géographie n'aient pas pris cette orientation, j'aurais été également moins perdue !!!
RépondreSupprimerK'line Bloom : je ne sais pas où tu as été au lycée dans ta jeunesse, mais je t'envie. Et surtout, je félicite ton professeur qui a eu l'initiative de vous faire découvrir la carte du tendre, j'aurais adoré moi aussi, mais il fallu que j'attende la venue d'une amie sur Avignon (Cri de la Vallée) la semaine dernière pour que je la découvre !!! Et depuis, je me suis dit que je devais en parler ici même pour la faire également connaitre à d'autres, ou tenter de leur infuser à nouveau un peu de tendresse à travers cette jolie invention du 17ème siècle !
RépondreSupprimerAdrian L : je fais ce que je peux pour que se dégage de ce blog un maximun de poésie et de tendresse, mais ce n'est pas toujours évident malheureusement !
RépondreSupprimeroui, quelle belle page de Mme de Scudéry (17e siècle quand même!) toujours d'actualité et merci à Clélie. Dans ce monde où la tendresse n'est pas, hélas! la priorité, il est rassurant de constater que l'amour est encore au rendez-vous.
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